L’injustice militaire
Antoine Jonas a été fusillé le 30 juin 1917 à l’aube. Pour l’exemple. Qu’a-t-il fait, ce Poilu un peu paumé ? Il faut dire que son dossier n’était pas des plus réjouissants. Accusé d’avoir tué à la baïonnette son lieutenant et une vieille dame lors d’une permission, d’avoir volé des bijoux...Bref, des charges qui vous amènent direct au peloton d’exécution. L’intérêt du livre de Patrick Pécherot réside dans la manière dont il nous fait vivre et souffrir avec les Poilus. Il retrace, pas à pas, les certitudes puis les doutes du capitaine Duparc, chargé de la défense lors du conseil de guerre. L’auteur sait, avec verve et finesse, faire progresser l’histoire, décrivant les officiers supérieurs souvent plus soucieux de leurs galons et de la qualité de leur whisky que d’économiser des vies humaines. Plus pressés aussi de bâcler un jugement que de laisser Duparc mener l’enquête. Il faut se plonger dans Tranchecaille, surnom de ce pauvre Jonas, pour comprendre la solidarité des Poilus, le sauve-qui-peut aussi, l’envie permanente de déserter, de s’extraire d’une manière ou d’une autre de cet enfer, quitte à se mutiler pour ne pas péter un câble. Un lire à lire absolument.
© Henri Israël, CFDT Magazine