L’Express video

Eric Libiot

Un collage de textes étonnant, une vraie invention littéraire. Patrick Pécherot a un talent fou pour décrire des personnages, une ambiance, un décor, en quelques mots, en quelques lignes. L’homme à la carabine, un bouquin qu’on ne lâche pas, du début à la fin.

Voir sur l’Express.fr : la chronique vidéo d’Eric Libiot



evene.fr

Philippe Blanchet

Patrick Pécherot aurait dû vivre un siècle plus tôt. Juste avant la der des ders et le Chemin des Dames, dans lesquels marnait il y a deux ans son roman noir Tranchecaille. A l’époque de Clemenceau. Des brigades du Tigre. Et bien sûr de la Bande à Bonnot à qui il consacre aujourd’hui cet étonnant ouvrage. Ni biographie, ni roman - encore moins polar -, L’homme à la carabine raconte, à travers un curieux collage littéraire, le destin du plus jeune des membres de la célèbre bande d’anars du début du vingtième siècle, André Soudy, ex-commis épicier et tubar promis à coup sûr à la guillotine de Deibler, boulevard Arago. Quelques photos d’époque du lascar, prises par les services de la Préfecture de Police, illustrent d’ailleurs le propos et lui donne une force inespérée. Mais ce portrait de jeune libertaire en gangster n’est pour l’auteur qu’un prétexte. Celui d’évoquer sans retenue (et avec une précision sémantique totalement maniaque !) les éléments d’une époque qui décidément le fascine au plus haut point. D’un bout à l’autre de ce récit éclaté, de toute beauté, Patrick Pécherot multiplie jusqu’au vertige les références. Ranime les fantômes des jeunes Henri Calet, Brassens, Arletty, Cendrars ou Vigo. Empile les œuvres de Proudhon, Kropotkine ou Stirner sur la table de chevet de squats végétariens de banlieue. Collectionne avec une lancinante érudition les détails d’une folle fresque comme on épingle des papillons, poussant le vice jusqu’à nous donner la carte du jour de chez Chartier (pommes à l’huile, jarret, poireaux vinaigrette). Soudain, alors, un sidérant film en noir et blanc se met à défiler...

© Philippe Blanchet, evene.fr

Alibi

C.T.

La bande à Bonnot Des anars qui veulent changer la vie, à commencer par la leur, "sans attendre que refleurisse le temps des cerises ". Alors le hold-up motorisé : del’inedit. Dans l’auto, André Soudy, voleur de sardines tuberculeux et syphilitique, guillotiné à 21 ans après le procès retentissant des autres membres de la bande L’Homme à la carabine retrace son histoire, d’arrêts sur image en feuilles volantes, photos, esquisses au trait sûr qui composent un roman-collage à l’écriture éblouissante, évocation magistrale du Paris des garnis à punaises, des faubourgs et des bistrots, de la chourave miteuse et des aubes humides. De la frousse et de la misère, de la camaraderie et de la liberté "poussée comme un bouchon". Et de son prix. Même si "longtemps, longtemps après que vous serez devenu poussière, les enfants chanteront encore l’histoire des bandits tragiques "

© C.T., Alibi

Historia

Joëlle Chevé

Fin d’un porte-flingue

Après Tranchecaille le paumé des tranchées, voici Bécamelle,le petit tubard de la bande à Bonnot. Condamné à mort en 1913, André Soudy entre dans les
annales du crime sous le nom de " l’homme à la carabine ". Entre roman et essai, Patrick Pécherot
restitue par petites touches l’itinéraire poétique et sanglant d’un gamin perdu qui n’était pas " venu au monde un flingue en pogne " et qui croyait encore à l’innocence du monde et à l’anarchie. Un portrait saisissant qui est aussi celui d’une époque, celle de la gouaille d’Arletty et du ronronnement des Delaunay-Belleville, des promenades aux Buttes-Chaumont, des Pieds Nickelés, des putains au coeur tendre et de l’huile goménolée. Et ce dernier pied de nez avant la guillotine : " Je lègue à M. Etienne, ministre de la Guerre, mes pinces-monseigneur, mes ouistitis et mes fausses clés pour l’aider à ouvrir la porte du militarisme social..."

© Joëlle Chevé, Historia

Le Figaro Magazine

Paulin Césari

Bande à part

André Soudy était un garçon fragile. Vaguement anarchiste, tuberculeux, craignant les frimas. « II fait froid, au revoir » furent ses dernières paroles, avant que le bourreau ne lui tranche la tête devant la prison de la Santé. Nous sommes en avril 1913. C’est le printemps. L’Homme à la carabine décrit la brève existence du plus jeune membre de la bande à Bonnot. Ce mélange disparate de gueux en goguette, d’anarchistes sincères et de marginaux délinquants défraya la chronique entre 1911 et 1912. En de courts chapitres épurés, esquisses habilement et brutalement juxtaposées, l’auteur trace avec brio le portrait de ce chien fou mélancolique embarqué dans de meurtrières et trépidantes
aventures. Ces « bandits tragiques » braquaient en
Delaunay, déjeunaient chez Chartier, tuaient les sergents
de ville. Il fallut les raccourcir ou les cribler de balles. Se jouant de la chronologie, de la Belle
Epoque à nos jours, l’auteur évoque Arletty, Brassens, Malet, chroniqueurs et témoins des quais et des brumes,
de la délinquance et de l’insoumission, de la misère et
de la déréliction. Il grave à l’acide et sans complaisance le portrait d’un desperado, « déserteur d’un monde en déroute ».

© Paulin Césari, Le Figaro Magazine

Noir comme Polar.com

Clémentine Thiebault

Vive le son de l’explosion

Jules, Octave, Raymond, Valet, André et Monier. La bande à Bonnot. Des outlaws, "comme dans un film de Feuillade qui ferait trembler le vieux monde". Des réfractaires, des insoumis, des libertaires, tricards du boulot, étiquetés, agitateurs, empêcheurs d’exploiter en rond. Des anars qui veulent changer la vie. A commencer par la leur. "Sans attendre que refleurisse le temps des cerises". Qui savent le prix du pain et de la camaraderie. Qui poussent la liberté comme un bouchon.
Le Paris des garnis à punaises, des gourbis, des prolos, des ouvriers. Les ruelles et les faubourgs, un labyrinthe d’ateliers, de meublés, de cours et de bistrots. Le pêcheur de gras à la sortie des égouts, la chourave miteuse, la toute petite combine, le tuyau percé, rafistolé, l’argent de poche trouée qui n’apaise pas la faim. Les épiceries, les caves, les nuits froides, les aubes humides, les caisses à porter, les courses à livrer, "les douze heures de rang et t’as pas fini ta journée ?" Les hirondelles, les inspecteurs en bourgeois, les tractions et les téléphones à manivelle.
Liabeuf, Deibler. L’exécution, l’émeute. Picasso, Cendrars, Jean Vigo, Lénine, Jaurès parmi les anonymes. Bardèche et Brasillach, Rebatet et l’Action Française. Arletty, Gabin, le Quai des brumes. René Fallet, Brassens, Vallès, Vian, Colette, Dieudonné et Dettweiller.
La communauté de Romainville. "On essaie tout et le reste. La diététique et l’amour libre, le végétarisme et l’espéranto, l’hygiénisme et la fausse monnaie, l’entraide et les combines".
Les petits matins, les grands soirs.
Et la De Dion plein gaz. Jules au volant. Bon pilote, excellent mécano. Et quelque chose en lui du pistard. Octave qui ne craint personne. Une force à tuer un bœuf et une seule loi : la sienne. André Soudy, le voleur de sardines. L’homme à la carabine. Le hold-up en auto, de l’inédit. "Nouveau crime des bandits en auto ! Hold-up sanglant à Chantilly ! Demandez L’Illustration !" La piste de la terreur. La traque, les mouchards, l’opinion qui s’émeut, les autorités qui s’agitent, les journaux qui se déchaînent. Bonnot insaisissable.
Enfin le procès, la foule au tribunal venue admirer les restes de la bande. "Jugés par des proprios et des marchands de moutarde". Les faire payer pour la rue Ordener, la place du Havre, Thiais et Chantilly. Pour la frousse que la bande a inspiré et la honte de l’avoir éprouvée. L’atteinte aux lois "faites au profit de quelques-uns uns et contre tous les autres". Le meurtre de l’agent Garnier, le crime de Montgeron, le meurtre de monsieur Jouin. La culpabilité des uns, la complicité des autres. 387 questions et autant de réponses.
Le 21 avril 1913, André Soudy, tuberculeux et syphilitique, est guillotiné. Il a 21 ans. Ses derniers mots ont été : "Il fait froid, au revoir !". L’Homme à la carabine retrace son histoire. Arrêts sur image, feuilles volantes, photos noir et blanc, esquisses. Trait sûr, écriture éblouissante, évocation magistrale, roman-collage insigne.
"Longtemps, longtemps après que vous serez devenu poussière, les enfants chanteront encore l’histoire des bandits tragiques".

© Clémentine Thiebault, Noir comme Polar.com}

Service Littéraire

Pierre Cornut-Gentille

Cétait la bande à Bonnot...

Pour revivre le début du siècle dans les milieux pauvres et anars.

Jules Bonnot, sa bande d’anarchistes et de traîne-savates, ont inventé l’attaque de banques en automobile. Dans les années 1911 et 1912, ils ont semé la terreur à
Pans et dans les environs. Le hold-up accompli et le caissier récalcitrant abattu - « ils donnent la mort comme on rend la monnaie » - ils s’engouffraient dans la De Dion ou la Delaunay-Belleville volée la veille. Sur leurs vélos, les flics pouvaient toujours chercher à les rattraper Les survivants de la bande furent arrêtés et jugés en avril 1913. Parmi eux, celui que les journaux appelaient « l’homme à la carabine », André Soudy, pauvre gosse paumé qui, à 23 ans, crachait ses poumons dans son mouchoir pendant qu’ il tenait son arme de l’autre main. C’est son portrait, sous-titré
"Esquisse", que nous brosse Patrick Pécherot, auteur de romans policiers. Maîs il ne s’agit ni d’une biographie, ni d’un polar. À partir de quelques traces - les photos anthropométriques, les coupures de presse - Pécherot nous livre dans le désordre chronologique une succession de scènes savoureuses. La langue est superbe, rythmée et vivante, celle des truands et policiers de l’époque. II fait revivre les milieux anarchistes, le Paris populaire et la misère de la zone du début du siècle. Le récit des aventures de la bande alterne avec les monologues d’André Soudy, vrais modèles du genre où l’on retrouve l’influence de Céline, d’Audiard et de Sallinger. Voilà une maniere originale et talentueuse de romancer l’histoire.

© Pierre Cornut-Gentille, Service Littéraire

L’Express

François Busnel

Un Poulbot chez Bonnot

C’est un livre puzzle. Un album de famille, presque. On y découvre, d’abord, sur la couverture, une image : celle d’un homme à la carabine. Le manteau long et le chapeau mou masquent ses formes, son visage. Reste l’oeil. Un oeil vif qui renvoie un demi-regard déterminé. Mais qui est-il, l’homme à la carabine ? Et, surtout, comment devient-on cet "homme à la carabine" dont les journaux ne cessent de parler en cette année 1912 ?
Tout est là. On ne naît pas bandit, on le devient. "Le déterminisme, vous lui avez filé un sacré coup de pouce", dira-t-il du fond de sa prison. Cet homme s’appelle André Soudy. Il vient de passer la vingtaine. Il a rejoint les "bandits tragiques" qui défraient la chronique, suscitent l’admiration ou l’effroi : la bande à Bonnot. Qu’est-ce qui a conduit André Soudy à devenir l’un des membres de ce gang ? Quel enchaînement de circonstances ? Quelle société ? Ce sont les questions que pose Patrick Pécherot dans un roman qui tient à la fois de l’enquête historique, de la fable et de la fiction. Passionnant de bout en bout. Glaçant, dans les dernières pages, lorsque Pécherot évoque les ultimes heures de Soudy, le pas silencieux des matons, à 3 heures du matin, à travers les couloirs de la prison de la Santé, le bruit des sabots dans la nuit jusqu’à cette place publique où se tient la Veuve. André Soudy a été guillotiné au mois de juin 1913. Il était l’homme à la carabine. Il n’avait jamais tué personne. Pourquoi Soudy ? A cause de ces rares photos où l’on voit un jeune homme pencher la tête, le regard dans le vide. Décalé, André Soudy. Ce gamin des rues, poulbot aux poches crevées, tentait de survivre dans cette France du début du siècle que saignera à blanc, quelques années plus tard, une Grande Guerre que personne n’avait vu venir. Soudy avait un nénuphar dans la poitrine, comme dirait Boris Vian. Tuberculeux. Jules Bonnot, qui fut jadis - ironie suprême - le chauffeur de sir Arthur Conan Doyle, l’emmène avec lui défier le patron du Figaro. Il suit, Soudy. Il fréquente les milieux anarchistes, magnifiquement tirés de l’oubli par Pécherot. Ce roman n’est pas une biographie. Et la langue, savoureuse, heurtée, gouleyante, qu’utilise Patrick Pécherot fait entrer Soudy dans les rangs des grands héros de la littérature.

© François Busnel, L’Express

L’Avenir (Belgique)

M.P.

Ami de Bonnot

Patrick Pécherot est l’un des auteurs de romans noirs les plus intéressants aujourd’hui. Comme chez Didier Daeninckx, chacun de ses livres constitue un véritable acte d’engagement historique, social ou politique.Tranchecaille (Folio Policier), par exemple, couronné par le Trophée 813 du meilleur roman noir francophone, plonge le lecteur dans l’horreur des tranchées à la suite de son personnage jugé par le conseil de guerre pour l’assassinat de son lieutenant. Via les témoins qui défilent en rendant compte de leur vécu, toute l’horreur et l’absurdité de cette « boucherie » est ainsi pointée. C’est également sur fond historique que se déroule son nouveau roman,L’homme à la carabine. Le titre renvoie à André Soudy, le plus jeune membre de la bande à Bonnot, une poignée d’anarchistes en voiture dont l’épopée criminelle ne durera que quelques mois entre 1911 et avril 1912, date de la mort de son leader. Arrêté en mars 1912, Soudy est guillotiné l’année suivante, à 21 ans. Ce livre n’est pas sa biographie mais un portrait de ces hommes et de leur époque, où la parole est parfois donnée à l’intéressé lui-même pour le récit de sa jeune vie. On y croise aussi Henri Calet, Léo Malet, Arletty ou Brassens. Une « esquisse » très personnelle, donc singulière.

© M.P., L’Avenir

CFDT Magazine

Henri Israël

"L’âme toute rongée par de foties idées"

Depuis ses livres édités dans la Série Noire, on savait Patrick Pécherot passionné par le roman plus ou moins policier, plus ou moins noir, mais souvent avec un arrière-plan historique. Cette fois-ci, Pécherot nous entraîne dans l’intimité d’André Soudy, "petit bandit au gros chagrin", un des comparses de Jules, de Raymond, dit "La science", d’Octave et de Victor, de Rirette, c’était la bande à Bonnot. Des anarchistes qui manient l’arme à feu, dévalisent les banques mais sont attachants parce qu’en ces années du début du XXème siècle, ils ont "le coeur gros comme ça, comme aurait dit Ferré. Certains sont morts tirés par les flics, d’autres, comme André, sous "cette saloperie de guillotine" . André le tubard, André qui n’avait pas de sang sur les mains, André, l’homme à la carabine. Pécherot a une tendresse pour ces gens-là. Une tendresse qu’on peut partager avec son allusion à Brassens qui "contre les cognes réconcilie tout le monde. Un beau livre dans le style des romans populaires où l’on ne s’encombre pas de grandes phrases ronflantes, mais de beaux sentiments.

© Henri Israël, CFDT Magazine

Le Républicain Lorrain

Michel Genson

Graine d’ananar

"De noir vêtu, en chapeau melon, tu sembles peint par Magritte. Ceci n’est pas un bandit." La photo est en noir et blanc, le pardessus flotte, trop large pour les maigres épaules. Quand ses poumons de tubard crachaient du sang, André Soudy était un peu à la remorque dans la bande à Jules Bonnot. Alors, "poucet fiévreux, semant des vannes comme des petits cailloux", il suivait, vaille que vaille, toussait, rigolait. La vie est trop chienne pour les traîne-misère de son acabit. Alors mort à la veuve, vive l’anarchie !
Un siècle plus tard, Patrick Pécherot prend la trace de ce gamin malingre, fier de la Winchester qu’il braque sur la foule avant de tirer dans les nuages. Au vrai roman, il préfère l’évocation, l’esquisse, les séquences courtes, cinématographiques, pour dire la geste tragique d’un paumé, d’un "innocent du monde". Pour dire une époque aussi, drôle d’époque. Au banquet, il convoque les frères d’âme, Brassens, Ferré, Henri Calet ou Lavilliers. Le résultat est plus qu’attachant. Poignant, faussement désinvolte, puis rageur, poétique. André Soudy a été guillotiné le 7 juin 1913, à Paris.

© Michel Genson, Le Républicain Lorrain

La grande Librairie

Jul

Dessin de Jul pour La grande Librairie, en ligne avec l’accord de l’auteur.

Lire

Alexandre Fillon

Le perdant magnifique

Patrick Pécherot retrace la vie d’André Soudy, membre de la bande à Bonnot, et son épopée tragique dans la France du début du XXe siècle
A bord d’une Delaunay-Belleville ou d’une De Dion-Bouton quatorze chevaux filant à pleins gaz, une poignée de bandits partaient faire des hold-up. Personne n’a oublié les méfaits de la bande à Jules Bonnot. Un petit homme d’un mètre cinquante-neuf dont le cœur ne jouait jamais le tambour, même quand il tenait un calibre à la main. Autour de lui, on croisait alors Octave qui ne craignait personne ; Valet, rêveur, capable de rester seul des jours, ou Raymond la Science, surnommé ainsi parce qu’il ramenait à tout propos celle qu’il s’était forgé seul. Tous étaient des libertaires, des réfractaires, des insoumis qui voulaient changer la vie, même au risque de perdre la leur.
Patrick Pécherot a choisi de consacrer une belle « esquisse » à l’un d’entre eux. André SOudy, tour à tour « l’homme à la carabine », « l’innocent du monde », ou « Bécamelle », né le 21 février 1892 à Beaugency, Loiret. Il n’avait pas vingt ans et un cœur d’artichaut, on l’appelait encore le « môme ». Ancien « garçon épicier » à Orléans, il s’était fait « coffrer » pour avoir « outragé », et ensuite « serrer » après un vol de sardines. Un poisson « très con » à ses yeux puisqu’il faut « en tenir une couche pour nager en bancs et mourir en boîte » !
L’auteur des Brouillards de la Butte (Folio Policier) et de Boulevard des Branques (Folio Policier) parvient à montrer toutes les facettes d’un perdant magnifique, maigre et pâle dans son grand manteau, qui souffrait d’hémoptysie. En chemin, le lecteur croisera également Arletty, Henri Calet, Georges Brassens, Victor Serge ou Louis Aragon qui immortalisa Soudy dans Les cloches de Bâle. L’aventure, on le sait peut-être, devait s’arrêter net le 21 avril 1913. Lorsque Soudy, condamné à mort par ceux qu’il nommait « les représentants de la vindicte sociale dénommée justice », fut guillotiné. Il n’avait pourtant jamais tué personne avec la Winchester dont il se servait pour tenir la foule en respect. Le fameux bourreau Anatole Deibler opéra à l’aube, boulevard Arago, devant la prison de la Santé.

© Alexandre Fillon, Lire

Le Monde Libertaire

Barnabas Collins

André Soudy sous les projecteurs

L’homme à la carabine, c’est le titre du dernier roman de Patrick Pécherot, paru chez Gallimard. Si le sujet en lui-même n’est pas d’une grande originalité - « l’épopée » de la bande à Bonnot -, son traitement l’est davantage. Surtout parce que l’histoire tragique de ces anarchistes nous est pour une fois contée à travers un autre prisme que celui de Jules Bonnot : celui du jeune tuberculeux André Soudy, rendu célèbre par la photo (celle de la couverture du roman) que les flics ont prise de lui lors d’une reconstitution du braquage de Chantilly. C’est donc l’aventure de ce petit gars, auquel on s’attache rapidement, qu’on suit du début à la fin, jusqu’à son exécution dramatique, à la guillotine, le 21 avril, à l’âge de 21 ans. Ensuite, parce que le tout se présente à nous comme une peinture impressionniste, si je puis dire. On y trouve de tout : des chapitres narratifs classiques, des flash-back, des commentaires de photographies, des « feuilles volantes », des entretiens, etc. Au premier abord, on pourrait trouver ça un peu « foutraque » et, les vingt premières pages, on a un peu de mal à savoir où on va. Mais, au fil de la lecture, l’ensemble se clarifie et prend une cohérence parfaite. Comme une peinture impressionniste : de près, on y voit que dalle, et plus on s’éloigne, plus on recule, et plus on parvient à distinguer ce que son auteur a voulu peindre. L’ensemble est aussi très bien documentée et, sans jamais tomber dans le roman historique un peu lourdingue, nous apporte un éclairage érudit sur la bande à Bonnot, les milieux politiques qu’elle fréquentait de plus ou moins près et, de façon plus générale, sur cette Belle époque qui n’était pas si belle pour tout le monde. Bref, cet Homme à la carabine est une fichue bonne lecture, poétique, émouvante, drôle, haletante et instructive. À ne pas louper, pour sûr !

© Barnabas Collins, Le Monde Libertaire

La Voix du Nord

Celui qui tient la crosse, c’est André Soudy. Membre de la fameuse bande a Bonnot, ces brigands pansiens qui inventèrent le braquage en automobile, dans les années 1910. Sur les pas de ce gamin tuberculeux au « pardingue râpe », on pénètre dans l’univers des anarchistes qui prônent le végétarisme et dessoudent les banquiers pour vider leur coffre On croise des barbeaux, on tourne les pages du Libertaire, on observe la « chourave miteuse ». La langue gouailleuse et précise de Patrick Pécherot doit beaucoup a la réussite de ce livre, qui s’avale comme un bon roman noir

Le Monde

Raphaëlle Leyris

Sur le cliché d’époque qui orne la couverture, Andre Soudy tient le photographe en joue, et porte un pardessus trop grand pour lui. Ce pourrait être un raccourci de sa vie, le plus jeune membre de la bande à Bonnet fut surnommé « l’homme a la carabine » mais n’a jamais tué personne, et n’avait pas la stature d’un ennemi public n°l. Patrick Pécherot, journaliste, auteur d’une dizaine de romans, trace le portrait de ce perdant magnifique, depuis son enfance miséreuse jusqu’à sa mort, sous la lame d’une guillotine, à 21 ans. II procède par courts chapitres, juxtapose instantanés, « arrêts sur image », « feuilles
volantes » pour restituer le destin tragique de ce Billy the Kid tubard, qui voulait vivre vite et savait qu’il mourrait jeune. Plus qu’une histoire de gangsters, ce roman-collage tout a fait prenant raconte une époque, ses injustices, et les raisons de se révolter d’une bande d’anarchistes devenus bandits.

© Raphaëlle Leyris, Le Monde

NVO (la nouvelle vie ouvrière)

Yonnel Liégeois

Paumé de Paname

Avec cet original Homme à la carabine, Patrick Pécherot met à bas plus d’un mythe. L’auteur de polars à succès (Trophée 813 du meilleur roman noir francophone 2009) nous conte en effet par le menu le quotidien d’un paumé de Paname : André Soudy, un des membres de la fameuse bande à Bonnot ! Un gamin de la banlieue, au parler des faubourgs, qui tente de survivre à vingt piges dans ce Paris tentaculaire à l’aube du XXème siècle. Mieux qu’une réhabilitation, un hommage quasi dérangeant.

© Yonnel Liégeois, NVO (la nouvelle vie ouvrière)