-Le Matin (Lausanne)

Pascal Busset

Le drapeau noir flotte sur la Butte

 C’étaient les années 20, le temps de l’après-der des ders. La poésie avait la couleur des fleurs d’anarchie, les petits truands croyaient tenir le haut du pavé mais finissaient par calancher dans le caniveau, et les grands magouilleurs industriels faisaient leur beurre de l’amitié-franco-allemande. Dans ce maelström surréaliste, on croise André Breton attablé au Cyrano, on défile pour sauver les têtes de Sacco et VAnzetti, on évoque respectueusement le grand Alexandre Jacob. Au milieu de tout cela, un quarté gagnant de Pieds nickelés qui jouent les brigands poissards, les détectives amateurs et les maîtres chanteurs occasionnels. Un quatuor déambulant dans les rues de Paname, à l’ombre de Nestor Burma l’immortel.

Patrick Pécherot, dans cet hommage décapant à Léo Malet, plante sa graine d’anar à Montmartre et signe, avec les Brouillards de la Butte, un petit bouquin qui a du coffre, formidable de drôlerie. Un polar au parfum de nostalgie rempli de dialogues argotiques dignes de Simonin. Un livre à refiler à ses aminches, ceux qui ont toujours un drapeau noir tatoué au fond du coeur.

© Pascal Busset, Le Matin